La force

"Dans des situations peu propices à son amélioration, une personne forte résiste aux influences nocives, supporte toutes les difficultés et s'efforce d'agir positivement pour surmonter les obstacles et se lancer dans de grandes entreprises".

La force est "la vertu des vertus" : la vertu des amoureux ; la vertu des convaincus ; la vertus de ceux qui, pour un idéal, sont capables de prendre tous les risques ; la vertu du chevalier qui, par amour pour sa dame, s'expose à des aventures sans nombre ; enfin la vertu de celui qui, sans sous-estimer la valeur de sa vie — chaque vie est irremplaçable — la livre généreusement, si besoin est, au profit d'un bien plus élevé (1). Cette présentation peut nous faire penser qu’aujourd’hui il n'existe plus beaucoup d'occasions de développer la vertu de force. D'une certaines manière, le "bien plus élevé" est occulté par d'innombrables petits "besoins" créés par l'homme. Il y a peu de chances de rencontrer l'aventure car tout est déjà fait, découvert ou organisé. On peut alors se demander comment satisfaire ce désir humain d'entreprendre quelque chose de grand, de se battre pour un idéal. Le chrétien ne se trouve jamais dans la situation extrême de devoir donner sa vie en témoignage de sa foi — dans le martyre, acte suprême de force — du moins dans les pays où la foi est acceptée et vécue par un bon nombre. Ordinairement, rares sont les occasions d'accomplir de grandes oeuvres pour l'Eglise de Jésus-Christ ; cependant, c'est le propre du chrétien que de rendre grands, par amour, les petits services de chaque jour.
Et là, nous pouvons trouver une solution au problème posé. Il ne s'agit pas de réaliser des actes surhumains ; de partir en Amazonie à la découverte de terres inexplorées par l'homme ; de sauver cinquante enfants d'un incendie ; tout cela étant le fruit d'une imagination débordante. Il s'agit plutôt de transformer les petites choses de chaque jour en une somme d'efforts, d'actes courageux, qui peuvent donner quelque chose de grand et d'héroïque, une véritable preuve d'amour.
Cela sous-entend que celui qui a une vision réduite de la vie n'arrivera jamais à développer la vertu de force. Il ne faut d'ailleurs pas oublier d'enseigner aux enfants que leur vie sert à quelque chose ; que malgré nos nombreuses misères et l'apparente petitesse de notre vie, chacun a la mission inaliénable de glorifier Dieu. Chacun peut et doit aimer, sortir de soi, servir les autres, se dépasser pour mieux travailler. Celui qui ne veut pas s'améliorer, qui a une tendance à l’égoïsme, qui ne cherche que son plaisir, n'a aucune raison de développer la vertu de force, car il est indifférent au bien.
C'est la raison pour laquelle on peut affirmer que la vertu de force est caractéristique des adolescents qui, par nature, ont de grands idéaux et veulent changer le monde. Si ces jeunes ne peuvent pas exprimer leurs inquiétudes, si leurs parents ne leur proposent pas des buts adaptés et des critères droits et vrais, cette énergie latente peut se retourner contre ce qui a été déjà construit et tout détruire. Concrètement, si nous apprenons à nos enfants à faire des efforts, à se maîtriser, mais sans leur enseigner ce qui est bien, ils peuvent finir par rechercher le mal avec succès.
Ces remarques sont fondamentales pour tout ce que nous allons dire maintenant.

Résister

Traditionnellement la vertu de force est caractérisée par les deux facultés : "résister" et "entreprendre". Considérons le premier aspect, le plus difficile, malgré ce que l'on croit communément. En effet, il "est plus pénible et héroïque de résister à un ennemi qui, par le fait même d'attaquer, est a priori plus fort et plus puissant que nous, que d’attaquer un ennemi qui, du fait de prendre l'initiative à son encontre, nous considérons plus faible que nous" (2).
D'après la description initiale de cette vertu, analysons ce que signifie "résister aux influences nocives" et "supporter les difficultés". Si l'on pense à notre activité quotidienne, on voit bien qu'il faut supporter des contrariétés tout en sachant que cette persévérance va contribuer à notre bien. Il y a aussi les difficultés que nous supportons mal et qui nuisent à notre progrès personnel.
Il est logique que la résistance aux premières demande moins de maîtrise, moins d'effort. Je pense à une séance chez le dentiste où, pour supprimer une douleur prolongée, nous allons supporter quelques petites gênes. Ou, dans un autre domaine, nous rendons volontiers visite à une personne dont la conversation nous ennuie mais dont nous savons qu'elle a besoin de parler. Lorsque la finalité est claire, il est plus facile de supporter une gêne passagère. C'est précisément de cette façon que l'on peut commencer l'éducation de la force chez les plus petits.
La principale difficulté rencontrée dans ce type d'endurance est la tendance des jeunes enfants à vivre uniquement dans le présent. En effet, le fait de savoir que la conséquence sera positive ne constitue pas une motivation suffisante pour accepter les moyens de guérir d’une maladie quelconque. Ainsi, un enfant de six ans n'accepte pas une piqûre sans se plaindre, même s'il sait que c'est le seul moyen de guérir. Pour eux, la motivation du type « cause à effet » ne suffit pas, il faut en trouver d'autres qui soient plus adaptées à la situation et à leur personnalité.
Considérons quelques exemples.
Deux enfants ont choisi un jouet bruyant, alors que le bébé vient enfin de s'endormir. Leur mère leur dit : "arrêtez de jouer avec ça, sinon vous allez réveiller le bébé". Dans ce cas, il est demandé aux enfants de renoncer à un jeu qui peut nuire à d'autres. On pourrait aussi leur suggérer de jouer à quelque chose qui n'entrave pas le sommeil du bébé. Dans le premier cas, le raisonnement du type « cause à effet » est renforcé par l'autorité de la mère. Dans le second cas, la motivation combine obéissance implicite (de toutes façons, la mère ne les laissera pas poursuivre le jeu bruyant) et l’attrait possible du jeu proposé. Le premier cas exige un plus gros effort de la part des enfants : l'occasion leur est offerte de développer la vertu de force en renonçant à leur jeu, en résistant au désir de continuer d'en jouir. En même temps, si les enfants le perçoivent comme un effort effectué au profit du petit frère ou de la maman, ils exercent aussi leur capacité de savoir résister par amour.
Prenons maintenant l'exemple d'un enfant qui voudrait aller jouer avant d'avoir fait ses devoirs de classe, alors que l'ordre inverse est prévu. Il s'agit encore de la nécessité de résister à un désir. L'enfant sait bien que s'il commence par faire son travail scolaire, il respecte les règles du jeu et ne risque pas d'oublier ses devoirs mais, à cet instant, la relation de cause à effet est une motivation insuffisante. La force consiste alors à résister à la tentation et peut résulter soit d'un effort — peut-être très important de la part d'un enfant — soit de l'influence des parents.
Ainsi pouvons-nous constater que l'enfant trouve dans la vie de famille quotidienne de nombreuses occasions de résister à un désir ou de supporter une douleur tout en sachant qu'il va y trouver son avantage. Du moment que les efforts sont soutenus par l'autorité parentale, ils servent à développer des habitudes. Mais ces habitudes doivent avoir un sens pour les enfants, et le plus tôt sera le mieux. Si l'enfant décide de renoncer à une sortie avec ses amis pour aider ses parents ou pour étudier, s'il résiste à la tentation de bâcler son travail et l'achève avec soin, de sa propre initiative, il est en train d'acquérir la vertu de force.
Les enfants doivent aussi apprendre à supporter les gênes et à résister à diverses influences nuisibles.
Dans le premier type d’endurance, le résultat est positif, clair et raisonnable. Dans le second, il s'agit de résister à certaines influences pour se maintenir dans la même situation, en conservant les mêmes possibilités d'amélioration. Prenons l'exemple d'un garçon qui a emprunté une revue pornographique à un ami. S'il décide de ne pas l'ouvrir, il ne perd ni ne gagne rien, mais évite un mal. Dans le cas contraire, il subit une mauvaise influence. Prenons encore l'exemple du garçon qui se trouve sur le point de se battre. Ne pas se bagarrer ne lui donnera aucun bien concret. Le faire pourrait entraîner un dommage. Dans ce domaine, il s'agit principalement d'apprendre aux enfants à dire non, non pas par peur, mais pour éviter un danger inutile. C'est précisément le développement de la force qui vainc la crainte, mais pour être véritablement une force, elle doit être gouvernée par la prudence. Si ce n'est pas le cas, elle peut tomber dans le vice de la témérité. La témérité méprise les injonctions de la prudence en allant à la rencontre du danger.
La vie familiale comporte bien des règles liées à la prudence, que nous avons appelées exigences préventives. Les parents exigent de leur enfant de cinq ans qu'il ne traverse pas la rue tout seul pour ne pas se faire écraser. Les enfants doivent apprendre par eux-mêmes ce qui peut leur faire du mal, ce qui peut leur nuire et, par conséquent, établir leurs propres normes adaptées à leur situation concrète. D'où la nécessité d'apprendre aux enfants à être prudents, à maîtriser la témérité, comme nous l'avons dit, mais également à surmonter les craintes non fondées.
Il faudrait ici nous arrêter sur quelques aspects de la vie quotidienne. À titre d'exemple, considérons la peur de l'obscurité. Notre propos n'est pas d'étudier les causes de cette peur, qu'elle soit innée ou acquise, mais de se mettre à la place des parents qui veulent apprendre la force à leurs enfants et les rendre capables de surmonter leur peur. D'une part, on attend des enfants qu'ils y mettent du leur, en fonction de leurs possibilités. Il ne s'agit donc pas de les protéger au point qu'ils ne soient jamais en contact avec l'objet de leur peur, mais de procéder progressivement en offrant l'aide nécessaire. Les deux extrêmes seraient les suivants : faire dormir un enfant dans le coin d'une vieille maison sans lumière et l'envoyer de nuit faire une course dans un lieu solitaire pour qu'il apprenne à surmonter sa peur ou, au contraire, laisser la lumière de la chambre allumée toute la nuit et éviter à l'enfant tout contact avec l'obscurité. "Procéder progressivement en offrant l'aide nécessaire" signifie montrer à l'enfant notre confiance en lui, le soutenir avec affection, lui expliquer la situation réelle et l'inciter à faire des efforts progressifs pour résister à sa peur. Si l'enfant est habitué à dormir avec la lumière allumée, on peut suivre la progression suivante : éteindre la lumière en laissant celle du couloir allumée et la porte entrebâillée ; puis éteindre aussi celle-ci, et se tenir dans un endroit d'où l'enfant pourra entendre la voix de ses parents, et ainsi de suite.
Les enfants ont bien souvent peur de l'inconnu, à l'instar des adultes, et c'est alors qu'ils ont besoin du soutien moral de leurs parents : qu'ils leur expliquent clairement ce qu'ils doivent faire (leur crainte vient peut-être de l'ignorance de ce que l'on attend d'eux ou de ce qui va se passer), ou même les accompagnent. En cette matière, il n'y a d'autre guide que le bon sens, sans perdre de vue notre objectif : que les enfants apprennent à surmonter une peur non fondée, à agir avec courage mais sans témérité.
En dernier lieu, nous pouvons étudier la possibilité de former cette vertu a posteriori, après que les enfants aient subi une contrariété ou un dommage. Prenons le cas de l'enfant qui rentre à la maison en pleurant parce qu'on l'a battu. L'une de solutions consiste à appeler les parents de l'autre enfant pour qu'ils le punissent. Mais cela ne contribue en rien au développement de la vertu de force. Peut-être pourrait-on proposer un bon motif pour que l'enfant, par un effort personnel, surmonte sa contrariété. On pourrait lui dire : "Quelle bonne occasion de l'offrir à Dieu !". Il nous arrive d'oublier que l'une des plus grandes choses que nous puissions offrir pour prouver notre amour, notre amour de Dieu, c'est d'offrir nos peines, en résistant au désir de se prendre pour une victime.
Il est évident que se plaindre ou laisser les enfants le faire revient à créer une ambiance contraire à la force. Cette vertu suppose que l'on accepte ce qui nous arrive avec un esprit sportif et non passivement, avec le désir de tirer un enseignement des situations les plus douloureuses.

L'indifférence

Nous avons déjà mentionné les trois vices opposés à la force : la peur, la témérité et l'indifférence. Dans le chapitre sur l'esprit d'entreprise, nous parlerons des deux premiers. Auparavant, considérons brièvement les conséquences de l'indifférence. L'indifférence est causée par l’absence de crainte (nous avons précédemment évoqué l'excès de crainte). Pour ne pas avoir à reconnaître leur devoir de s'améliorer, ou l'existence d'influences nocives, les indifférents adoptent une attitude passive, commode et paresseuse.
Il est clair que ce genre de personne se contente de recevoir sans effort, ce qui nous intéresse, nous, éducateurs, car il existe une tendance chez certains parents à protéger leurs enfants et faire les efforts à leur place, de telle sorte que les enfants n'apprennent qu'à recevoir. Dans cette situation, il est probable que l'on trouve une certaine indifférence vis-à-vis du connu mais, une fois confronté à l'inconnu, dépourvu de l'aide des parents, le jeune ne peut pas s'en sortir et, par manque de prudence ou par manque de crainte, se trouve dans l'impossibilité de vivre de façon droite.
Une vie commode, sans sobriété, finit par se transformer en exercice d'égoïsme. L'égoïste, lorsqu'il obtient ce qui lui fait envie, trouve une "satisfaction superficielle". Dans le cas contraire, il s'effondre ou cherche le palliatif qui lui tombe sous la main.
Pour que les enfants ne soient jamais indifférents dans la vie, il faudra leur demander des efforts dès leur plus jeune âge, leur apprendre à supporter les désagréments (depuis le bébé qui pleure par caprice jusqu'à l'adolescent de mauvaise humeur à cause d'un ami contrariant). "C'est ainsi que nous imaginons les hommes forts et courageux : sans peur de souffrir ; des hommes qui savent souffrir en silence et qui se taisent pour ne pas être plaints ; sans crainte du sacrifice ni de la lutte ; que les difficultés n'arrêtent pas ; sans crainte d'avoir peur ; sans timidité ni complexes imaginaires ; sans frivolité ; sans jamais se scandaliser de ce qu'ils voient ou entendent. L'intégrité est force" (3).
Et pour aller de l'avant, pour supporter ce qu'il y a à supporter, pour ne pas tomber dans l'indifférence, la patience est indispensable. La patience est la vertu qui « aide à supporter sans tristesse ni abattement les épreuves physiques et morales » (4). Pour mieux comprendre cette définition, il faut savoir que les vices contraires sont l'impatience et l'insensibilité.
Passons maintenant à l'aspect "entreprendre" qui figurait dans la description initiale de la force : la personne "s'efforce d'agir positivement pour surmonter les obstacles et se lancer dans de grandes entreprises".

Entreprendre

Pour pouvoir attaquer, pour entreprendre quelque action qui suppose un effort prolongé, il faut de la force physique et morale. Et nous comprenons aussitôt pourquoi le sport a toujours été lié à la vertu de force. Surmonter la fatigue, le sommeil, la faiblesse, prépare la personne à entreprendre des actions qui se répercutent directement sur le bien des autres, pour la gloire de Dieu. Et le sport offre bien des possibilités à cet égard, car il comporte des motivations immédiates, telles qu’atteindre le sommet d'une montagne, gagner la partie, remporter la course, améliorer son record, ne pas décevoir ses amis. Si la personne n'est pas capable de se dépasser dans le domaine physique, il est probable qu'elle ne s'efforcera pas davantage dans sa lutte ascétique. Cependant, nous ne pouvons établir de relation univoque entre le sport et les autres domaines de dépassement de soi. Il existe également les possibilités suivantes : le camping ; se lever à l'heure prévue sans hésiter ; les douches froides ; se rendre au travail à pied. D'autre part, il semble convenable d'enseigner aux enfants à supporter les intempéries et les appétits sans se plaindre. Les mères peuvent notamment veiller à ce que les enfants ne soient pas trop couverts en hiver (sans omettre le nécessaire), les laisser sortir par tous les temps, leur apprendre à supporter la soif sans se plaindre.
Tout ce que nous avons dit dépend de l'éducation de la force en tant que fermeté dans l'agir. Considérons à présent cette vertu dans son aspect "entreprendre" et, en premier lieu, ce qu'implique le fait d'atteindre un bien ardu ou difficile.
Pour pouvoir atteindre un bien, soit enrayer un mal, soit développer quelque chose de positif en soi, il faut faire preuve d'initiative, décider puis exécuter la décision, et cela coûte que coûte.
Saisir toutes les possibilités d'une situation requiert une certaine sensibilité qui se traduit par l'étincelle de l'initiative. On n’obtient pas ce résultat lorsque la personne est habituellement indifférente, comme nous l'avons vu précédemment. Le fait de prendre une initiative, d'imaginer ce qu'il y a de mieux, sans rêver, suppose une attitude face à la vie que les parents peuvent stimuler chez les enfants dès leur plus jeune âge. Il ne s'agit pas de résoudre les problèmes que les enfants peuvent résoudre d’eux-mêmes, ni de les dévoiler avant qu'ils se soient rendus compte de la situation. On peut, par contre, insinuer qu'il existe un problème à résoudre. Par exemple, si un enfant a raté plusieurs fois l'autobus pour l'école, ses parents peuvent se charger de le réveiller, de l’habiller, de l’emmener jusqu'à l'arrêt et de l’installer dans l'autobus. Cependant, cette attitude ne l’aidera pas à prendre des initiatives ni à résoudre ses problèmes. Les parents peuvent procéder de la façon suivante : lui suggérer de s'organiser de manière à arriver à l'arrêt de bus à temps ; puis lui demander s'il a trouvé une solution.
En général, entreprendre lorsqu'il s'agit de profiter d'une circonstance favorable pour s'améliorer suppose de l'initiative et de la persévérance. Les enfants trouvent logiquement plus facile d'agir en ce sens que de contrecarrer une situation nocive. Nous étudierons les problèmes liés à la persévérance dans un chapitre ultérieur. Cependant, considérons brièvement certaines conditions indispensables pour qu'il y ait une lutte efficace en présence de difficultés.
Tout d'abord, une motivation proportionnée et orientée est nécessaire. Les enfants doivent envisager l'effort à fournir comme quelque chose de nécessaire et de souhaitable. Mais il ne suffit pas que l'acceptation vienne de la raison. L'effort doit être assumé en profondeur, car il faut une force intérieure pour surmonter les difficultés. Et c'est là que la colère devient licite et souhaitable. "Le fort peut utiliser la colère comme instrument pour agir avec force en attaquant ; pas n'importe quelle colère, mais seulement celle que l'on maîtrise et que l'on rectifie par la raison" (5). En effet, si l'ambiance que l'on veut dénoncer est injuste, frauduleuse ou fausse, il faut la reconnaître sans se scandaliser, mais en même temps, laisser croître le feu qui se trouve en chaque personne de manière contrôlée. Si les ennemis luttent avec acharnement, il ne suffit pas de se plaindre et de tout accepter sans agir.
D'autre part, il est nécessaire de maîtriser la témérité pour accomplir les choses avec prudence, sans gaspiller ses forces inutilement.
Pour résumer, "le chemin de la vertu est semé d'innombrables obstacles et difficultés qu'il faut surmonter avec courage si nous voulons parvenir au sommet. Un grand esprit de décision est requis pour entreprendre le chemin de la perfection coûte que coûte, ainsi que du courage pour ne pas s'effrayer de la présence de l'ennemi, et pour l'attaquer et le vaincre, et beaucoup de constance et d'endurance pour soutenir l'effort jusqu'au bout sans rendre les armes au milieu de la bataille. Cette fermeté et cette énergie sont fournies par la vertu de force" (6).

Quelques problèmes liés à l'éducation de la force

Il est relativement courant de voir des parents exiger des efforts de leurs enfants dans toute une série d'activités. Il est probable que ces derniers pratiquent un sport et croissent en force physique. Cependant, il existe d'autres domaines prioritaires qui échappent souvent à l'attention des parents.

1) Il faut fournir aux enfants des occasions, non seulement de faire des efforts mais également de résister.

2) Il faut les encourager à emprunter des voies qui leur permettent de s'améliorer et supposent un effort continu.

3) Il faut leur apprendre certaines choses qui en valent la peine et dont ils saisissent bien l'importance.

4) Il faut leur enseigner à prendre position, à accepter certains critères, à vivre ce qu'ils disent et pensent, c'est-à-dire à être cohérents.

5) Il ne faut pas oublier de sans cesse nous dépasser, pour être exemplaires et pour notre propre bien.

Comme nous l'avons dit précédemment, cette vertu a des conséquences particulières chez les adolescents. Lorsque l'adolescent commence à prendre des décisions, il peut tomber dans l'indifférence et rejeter les opinions et positions de ses parents sans être capable de les remplacer par des plus personnelles. Il se trouve alors à la merci de n'importe quelle personne volontaire parce qu'il n'est pas fort. D'autre part, si la vertu de force est peu développée en lui, même s'il veut s'améliorer et entreprendre des actions en vue d'un bien reconnu, il ne sera pas capable de surmonter les difficultés. La force intérieure doit se fonder sur la vie passée.
D'autre part, si les adolescents ont acquis cette force, leurs situations leur offre de nombreuses occasions d'être généreux, justes, etc., parce qu'ils sont inspirés par un grand idéalisme. C'est le moment pour eux de conquérir le monde ou, plutôt, de conquérir leur monde, le monde propre à chacun.
Le développement de la vertu de force renforce celui de toutes les autres vertus. Dans un monde rempli d'influences extra-familiales, dont la plupart entravent le progrès personnel de nos enfants, la seule façon d'être sûrs qu'ils survivent en tant qu'être humains dignes de ce nom est de les armer de force intérieure, de telle sorte qu'ils sachent reconnaître aussi bien leurs propres capacités que la situation qui les entoure, pour pouvoir résister au mal et entreprendre le bien, faisant de leur vie quelque chose de noble, d'énergique et de complet.

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