La justice
“La personne juste s’efforce continuellement de donner aux autres ce qui leur est dû, de façon à ce qu’ils puissent faire face à leurs devoirs et exercer leurs droits, en tant que personnes (droits à la vie, aux biens culturels et moraux, aux biens matériels), en tant que parents, enfants, citoyens, professeurs ou dirigeants - et elle fait en sorte que les autres se comportent dans le même sens”.
La justice est une vertu qu’il est à la fois facile et ardu de commenter. D’une part, c’est l’une des rares vertus dont on peut dire qu’elle est à la mode. D’autre part, par là même et par nature, c’est l’une des vertus les plus difficile à analyser.
La justice introduit l’ordre dans nos rapports avec Dieu et avec les autres ; elle permet que nous respections mutuellement nos droits respectifs ; que nous remplissions nos devoirs ; elle requiert simplicité, sincérité et gratitude. En un mot, si chacun cultivait cette vertu, la société jouirait d’un bien-être presque complet, de la paix, même si, selon les explications de Saint Thomas, la paix ne découle qu’indirectement de la justice, c’est-à-dire dans la mesure où la justice débarrasse la paix de ce qui lui fait obstacle. La paix découle de la charité, car cette vertu produit l’union des coeurs.
Autre problème posé par l’analyse de cette vertu : l’existence de toute une série de vertus annexes, dont chacune présente un intérêt particulier pour les éducateurs. Je veux parler de l’obéissance, de la piété (qui concerne les devoirs des enfants envers leurs parents, ainsi que les obligations envers la patrie), de la sincérité, de l’amitié et de la religion. Aussi faut-il préciser d’emblée que notre propos, ici, est d’étudier la justice proprement dite, les vertus annexes étant traitées dans les chapitres ultérieurs.
Quelques précisions sur le concept de justice
Afin de ne pas confondre la justice avec d’autres vertus, il convient d’avoir à l’esprit les trois aspects toujours présents dans un acte juste : l’altérité, le strict droit et l’égalité.
Altérité signifie que la justice ne se réalise que vis-à-vis d’autres personnes. Le fait qu’un enfant casse le jouet d’un autre est une injustice s’il ne remédie pas à la situation en remplaçant le jouet ou en le réparant. Si c’est son propre jouet que l’enfant casse, il n’y a pas injustice, mais plutôt manque de pauvreté.
Strict droit signifie qu’il ne s’agit pas d’un cadeau mais d’un dû. C’est la raison pour laquelle la justice est fonction de la capacité de l’individu à reconnaître sa dette. Nous voyons, par ailleurs, que s’il s’agit de donner exactement ce qui est dû, cela peut aller très loin. C’est pourquoi, en analysant la justice, on ne pourra faire abstraction de la charité.
Egalité signifie correspondance exacte entre ce qui est dû et ce qui est donné. Il ne peut y avoir ni plus ni moins pour que l’acte soit juste.
Il faut également savoir que l’acte juste implique trois structures :
1) les relations interpersonnelles,
2) les relations de la société avec l’individu,
3) les relations de l’individu avec la société.
Pour désigner ces structures, on parle respectivement de justice commutative, de justice distributive et de justice légale.
Rappelons qu’être juste ne se ramène pas à agir ponctuellement de façon juste, mais consiste à agir constamment selon les normes de la justice. Rappelons également que cette vertu réside dans la volonté et non dans l’intelligence. Elle ne régit pas des actes cognitifs comme le fait la vertu de la prudence, mais permet à la personne de bien agir.
Les relations entre les enfants et les autres
Pour savoir quels aspects de la justice les éducateurs doivent traiter, il faut tenir compte de certaines caractéristiques des enfants : leur âge, leur niveau intellectuel et le type de relations qu’ils ont avec les autres.
Si l’on observe des enfants de diverses tranches d’âges, on remarquera facilement la propension des plus jeunes à l’injustice. Cela s’explique par le fait qu’ils n’éprouvent nullement le besoin de dissimuler un acte injuste qui ne l’est pas à leur yeux. Un petit enfant peut désirer quelque chose qui ne lui appartient pas et, par le simple fait de le désirer, considérer qu’il a le droit de s’en emparer. En revanche, lorsqu’il aura atteint l’âge de raison et aura une idée plus claire de ce qui est raisonnable dans ce domaine, il préfèrera, dans un cas similaire, se cacher ou se justifier.
Selon les études réalisées par Piaget à propos de l’évolution de la notion de justice chez les enfants (2), il semblerait que, pour l’enfant de sept ou huit ans, le point de référence soit ce que disent les parents. A partir de cet âge, il découvre le besoin d’être traité à pied d’égalité avec les autres et ce n’est qu’à partir de onze ans qu’il comprend que la justice ne se traduit pas par l’égalitarisme, mais par un traitement équitable qui tient compte des responsabilités et des circonstances de chacun. Au vu de ces données, nous serions tentés de penser que le rôle des parents doit varier suivant l’idée que se fait l’enfant de la justice..
Comme nous l’avons dit, il ne peut y avoir d’acte juste si l’individu ne reconnaît pas qu’il a des devoirs ; et pas davantage si, une fois ses devoirs reconnus, il ne parvient pas à tenir compte des circonstances. Et cela suppose que l’on fasse appel à son intelligence et à sa volonté.
La justice jusqu’à l’âge de neuf ans
Le petit enfant peut difficilement agir consciemment avec justice, mais il peut, avec l’aide de ses parents et de ses frères et soeurs ainés, apprendre à discerner “ce qui n’est pas bien”, ce qui est injuste. Et cet apprentissage peut se faire dans le cadre de ses relations avec ses frères et soeurs de la même tranche d’âge, ainsi qu’avec ses camarades et amis. C’est le moment d’insister sur les règles du jeu. Les parents entament le processus, puis le groupe impose les règles. En fait, les parents auront remarqué que les petits font souvent appel à eux pour résoudre des problèmes de justice soulevés au hasard de leurs jeux. En revanche, à partir de neuf ou dix ans environ, les enfants discutent les règles entre eux et ne font appel aux parents que s’ils perdent le contrôle de la situation. Ils préfèrent même abandonner le jeu plutôt que d’accepter l’arbitrage des parents.
Ces réflexions pourraient laisser à penser que, jusqu’à huit ou neuf ans, l’éducation de la justice s’appuie sur certaines règles du jeu et, en même temps, consiste à préciser ce qui n’est pas juste. Cela ne se fait pas en cherchant à comprendre la motivation des enfants, mais plutôt en les aidant à acquérir ces habitudes à force de tendresse, de compréhension et d’exigences. Concrètement, on pourrait se fixer les objectifs suivants :
- qu’ils apprennent à conclure un accord avec un frère, une soeur ou un ami, et à s’y conformer ;
- qu’ils acceptent les règles du jeu, une fois qu’ils en ont pris connaissance ;
- qu’ils disent la vérité, dans la mesure où ils la connaissent ;
- qu’ils respectent la propriété d’autrui : ne pas voler, ne pas casser, etc.
- qu’ils respectent les besoins et les droits des autres : la chambre des frères et soeurs, le silence aux heures d’étude, l’intimité des autres (frapper avant d’entrer, ne pas interrompre une conversation).
Les enfants se préparent ainsi à comprendre qu’il existe des droits et des devoirs. Et ils en auront besoin toute la vie. La personne la plus juste sera celle qui discernera quels sont ses propres droits et devoirs, quels sont ceux des autres, en fonction de leur appartenance à la même famille ou à la même société, en tant que parents, citoyens, etc.
Cette affirmation peut nous indiquer la marche à suivre pour cultiver la vertu de la justice chez les enfants dont l’intelligence et la volonté sont plus développés.
De neuf à treize ans
Nous avons déjà fait allusion au moment où, dans sa vie, l’enfant exige d’être traité comme les autres. Il ne conçoit pas que chacun doive être traité suivant sa situation particulière et, de ce fait, ne fait pas de distinction entre justice et égalitarisme. Nous examinerons les conséquences de cette attitude lorsque nous aborderons la justice des parents. La compréhension des enfants au sujet de ce qui est juste naîtra, du moins en partie, de la façon dont ils apprendront à utiliser les règles du jeu dans les activités qu’ils auront avec leurs frères et soeurs. Ce n’est que peu à peu qu’ils peuvent comprendre que ces règles, à l’instar des principes moraux en général, sont - pour être pragmatique - des mesures destinées à favoriser la bonne entente entre égaux. La justice se revêt alors d’un sens nouveau pour l’enfant. Elle rend possible et facilite la vie en société. Elle génère l’ordre et le bien-être. Ils acquerront également le sens de ce qui est injuste en éprouvant un sentiment de révolte devant l’injustice, en remarquant que l’ordre reconnu a été détruit.
Cependant, le problème évoqué persiste. Les enfants désirent être justes, mais ne savent pas ce qui est juste. Il pourrait sembler que la justice est une vertu réservée aux plus grands. Mais il n’en est pas ainsi. La compréhension de ce qui est juste oriente correctement l’acte juste. Pour être juste, il faut avoir pris l’habitude d’agir justement, même si nos critères sont faux. C’est la raison pour laquelle la vertu de l’obéissance est si importante. En obéissant à leurs parents, les enfants agissent avec justice et apprennent à être justes envers leurs frères et soeurs et leurs amis. Sans cet entraînement, la vertu sera beaucoup plus pénible à acquérir.
Il ressort de ce que nous avons dit que, durant cette deuxième étape, l’attention des parents envers les enfants peut se centrer sur quatre aspects :
1) continuer à mettre l’accent sur les actions justes et expliquer ce qui est injuste,
2) les aider à comprendre et à mieux vivre les raisons d’être juste,
3) leur expliquer la différence entre les conditions et circonstances de diverses personnes,
4) leur apprendre à rectifier et, par conséquent, à réparer.
On remarquera que les points 1) et 4) relèvent de la volonté ; le point 3) de l’intelligence et le point 2) des deux à la fois.
Commençons par les points liés à la volonté. Quels actes de justice les jeunes âgés de dix à treize ou quatorze ans peuvent-ils réaliser ? Nous pouvons évidemment reprendre les exemples donnés pour les plus jeunes, mais nous avons ajouté les possibilités suivantes :
- les aider à réfléchir sur l’opportunité d’une action, quand ils viennent d’expérimenter une injustice de la part d’un autre. Diogenes Laercio écrit : “Il existe trois choses qui présentent une difficulté particulière, à savoir : garder un secret, supporter l’outrage d’une injustice, et faire bon usage du temps dont nous disposons pour nos loisirs”. Dans ce cas, le plus juste consiste à informer une personne compétente de l’injustice afin de résoudre le problème, faire en sorte que la personne qui a commis l’injustice apporte une juste réparation, prendre des mesures compensatoires, ou même pardonner, parce que l’autre a besoin de ce pardon. De toutes façons, il s’agit d’éviter tout acte de vengeance, c’est-à-dire toute injustice en guise de représailles car, au fond, c’est à soi-même que l’injustice fait le plus de tort.
- parler des autres avec respect, en cherchant les aspects positifs. Montrer combien sont injustes la médisance, la calomnie et, le fait de “tenir des propos diffamatoires à l’encontre de quelqu’un devant l’un de ses amis, ce qui représente une injustice particulièrement grave car on ne peut pas vivre sans amis”.
- rendre ce que l’on nous a prêté dans l’état dans lequel nous l’avons emprunté.
- montrer aux enfants les possibilités qu’ont les autres d’accomplir une bonne action, de telle sorte qu’ils puissent les aider à agir de façon responsable.
- leur apprendre à obéir aux ordres exprès de leurs parents et des autres autorités.
- les aider à ne pas se rendre coupables de petits actes d’injustice qui semblent sans importance mais qui, s’ils se répètent, créent un climat où il est difficile de poser des actes bons (prendre le bus sans ticket, aller voir un film sans avoir l’âge requis, raconter de “petits” mensonges pour s’épargner des efforts, etc.).
En ce qui concerne la capacité à rectifier, qui est une manière de réparer l’injustice commise, il est évidemment nécessaire de cultiver parallèlement la prudence afin que, justement de tels incidents ne se renouvellent pas trop souvent. Lorsqu’ils se présentent, il faut apprendre aux enfants à demander pardon et à réparer. Certains trouveront plus facile de demander pardon que de réparer, alors que pour d’autres, ce sera le contraire. L’exemple des parents est fondamental, mais il conviendra aussi d’expliquer à l’enfant les raisons qui justifient un effort aussi important.
Les motivations
Il semblerait que, dès son plus jeune âge, l’enfant soit conscient de l’existence de quelque chose que l’on pourrait appeler justice, bien qu’il en ait une vision erronée. Piaget explique comment les enfants de sept à neuf ans croient à ce qu’ils appellent une justice immanente. C’est-à-dire que la justice provient de l’acte même qui est accompli. A titre d’exemple, Piaget explique qu’il a raconté à de nombreux enfants de divers âges qu’un petit garçon avait volé une pomme et qu’il était tombé malencontreusement à l’eau parce que le pont qu’il devait emprunter pour rentrer chez lui s’était effondré. La plupart des auditeurs de moins de neuf ans considérèrent que le dénouement de l’histoire était la conséquence directe du vol. En revanche, le pourcentage des tenants de cette thèse était inversement proportionnel à l’âge des enfants. Cette conception de la justice signifie que, d’une certaine manière, le petit enfant reconnaît la nécessité d’un ordre naturel des choses, et la principale motivation que nous pouvons leur donner pour qu’ils soient justes est la reconnaissance de cet ordre à chaque moment et du pourquoi de son existence.
Par ailleurs, comme nous l’avons dit en maintes occasions, il ne suffit pas d’expliquer. Les parents doivent également apporter leur soutien affectif, se montrer plus exigeants à certains moments, plus compréhensifs à d’autres. Les frères et soeurs doivent aussi participer. Quand l’enfant aura reconnu le bien-fondé de l’acte juste, il l’accomplira peut-être par crainte des parents au début, puis par devoir, ou mû par le désir authentique d’agir pour le bien d’autrui.
Etre juste envers chacun selon sa condition et ses circonstances
Rappelons que ce n’est que vers l’âge de onze ans que l’enfant commence à comprendre que la justice signifie nécessairement donner la même chose à chacun. Jusqu’à l’âge de treize ou quatorze ans, il se peut que l’on obtienne peu de progrès dans ce domaine, mais il faut préparer le terrain pour que, plus tard, alors dotés d’une plus grande capacité intellectuelle, les enfants puissent réaliser des actes vraiment justes, dans la mesure du possible.
A ces âges, il s’agit surtout de les aider à comprendre que nous sommes tous différents, et cela suppose qu’ils apprennent à être plus sensibles. Une personne n’est pas seulement quelqu’un qui fait des choses, elle a une âme, des sentiments, des pensées qui lui sont propres. Agir de la même façon avec tout le monde serait donc insensé : cela n’aurait de sens que si les gens étaient des machines.
Aussi faut-il aider les enfants à établir une distinction entre :
- les frères et soeurs d’âges différents ;
- les frères et soeurs ayant des besoins particuliers (besoin de recevoir une aide quelconque, des indications concrètes, etc.) ;
- les personnes suivant leur état d’âme. L’acte juste peut être réalisé à un moment opportun ou non, etc.
Les plus grands
Jusqu’à présent, nous nous sommes principalement intéressés à la justice perçue dans le contexte familial, ainsi qu’aux activités liées aux personnes vivant dans ce groupe. On suppose que la volonté de l’adolescent est suffisamment forte pour lui permettre de réaliser des actes justes dans d’autres contextes, puisqu’il est plus à même de les comprendre.
Il faudra également tenir compte du fait que les adolescents, par nature, sont très idéalistes, recherchent de grandes solutions à des problèmes “importants” et conçoivent la justice comme un idéal et non pas comme une réalité vécue avec autrui.
L’adolescent doit apprendre quels sont ses devoirs de fils, de frère, de camarade, de citoyen, afin de maintenir un équilibre entre ses préoccupations et son activité quotidienne. Il n’a plus besoin qu’on exige de lui tel ou tel comportement mais qu’on l’aide à comprendre ce qui est juste dans chaque circonstance.
A la suite des expériences de Piaget évoquées plus haut, plusieurs psychologues ont poursuivi l’étude des notions de justice et de moralité chez les enfants et chez les jeunes. Dans l’une de ses études, Rest - en s’appuyant sur les travaux de Kohlberg - arrive à distinguer six étapes dans l’évolution du jugement moral. Les deux dernières étapes ne peuvent être atteintes qu’à partir de l’âge de 20 ans, environ. Aussi les laisserons-nous de côté. Au cours de la première étape, l’enfant fait son apprentissage en obéissant aux adultes. Cela se traduit, dans une deuxième étape, par le fait qu’il comprenne la nécessité d’établir des accords avec les autres ; qu’il puisse exister un devoir et une chose due de part et d’autre, mais comme un simple échange. Il reconnaît ensuite que, pour vivre avec les autres, il faut agir avec justice envers eux, et l’ébauche d’une mutuelle collaboration commence à voir le jour. Puis l’on passe à la quatrième étape, au cours de laquelle l’individu reconnaît la loi, ainsi que ses devoirs vis-à-vis de l’ordre social. Bien qu’aucune indication ne soit donnée quant aux rapports entre les étapes et les âges, il semblerait que la quatrième étape coïncide avec l’adolescence.
Ces études nous confortent dans l’idée qu’il faut enseigner aux adolescents ce qu’est la loi. Mais j’ajouterai qu’il ne faut pas seulement leur parler de la loi civile mais aussi de la loi naturelle. Les enfants auront besoin de critères de jugement pour pouvoir prendre position sur les innombrables problèmes de justice qui se présentent tous les jours.
La justice des parents
L’un des doutes que rencontre le plus fréquemment un père de famille est de savoir s’il a été juste envers ses enfants. Dans la Rome antique, la justice était représentée par une femme aveugle cherchant à équilibrer une balance. Il est évident que nous, parents, devons nous montrer aussi objectifs que possible dans nos rapports avec nos enfants. Cependant, il est parfois très difficile de vivre la justice, pour les uns comme pour les autres. Aussi l’affection doit-elle être constamment présente. Les parents s’acquittent d’un rôle que l’on peut inclure dans ce que nous avons appelé la “justice distributive”. “Bien agir” suppose que l’on essaie de faire abstraction de la sympathie ou de l’antipathie que nous inspire chacun des enfants. Chacun est différent et requiert un traitement particulier, mais il s’agit d’harmoniser notre comportement en tenant compte de certaines règles en usage dans toute famille. Ces normes familiales doivent être établies selon des principes fondamentaux liés aux droits suivants :
- droit au respect des autres ;
- droit à l’aide des autres en vue d’atteindre une maturité naturelle et surnaturelle croissante ;
- droit de participer selon nos capacités ;
- droit de vivre en harmonie avec les autres, en respectant un certain ordre;
- droit à l’intimité.
Evidemment, à chaque droit correspond un devoir. Mais l’interprétation de ces droits et devoirs diffère suivant les caractéristiques et les circonstances de chacun. C’est pourquoi il est nécessaire de faire preuve d’une grande souplesse lorsqu’on exige d’un enfant et que l’on oriente son activité.
Lorsque les enfants ne remplissent pas leurs devoirs, les parents se trouvent confrontés au problème des punitions. Il est absurde de dire que l’on est pour ou contre car, en réalité, nous passons notre temps à sanctionner les enfants, en leur souriant, en les écoutant - sanctions positives - ou, au contraires, en les ignorant lorsque nous lisons le journal, en regardant notre montre alors qu’ils nous racontent quelque chose de très important pour eux - sanctions négatives. Pour qu’elles permettent à l’enfant de progresser, les sanctions doivent être appropriées. Nous ne cherchons pas seulement à être justes, mais à nous montrer justes en vue d’obtenir l’amélioration personnelle de notre enfant. L’enfant et l’adolescent attendent de leurs parents qu’ils se comportent avec justice à leur égard, et cela implique aussi que ces derniers les punissent quand il le faut.
Le jeune enfant pense en général que lorsqu’on a enfreint une règle, la punition doit être sévère, et qu’il faut chercher un moyen d’expiation. Et il ne change d’avis que lorsque les exigences et le contrôle directs des parents commencent à se poser en termes de coopération de tous les membres de la famille. L’enfant découvre alors que la punition la plus adéquate est d’exiger une réparation - si un enfant casse un carreau, il ne s’agit pas le priver de télévision pendant une semaine mais de l’obliger à remplacer le carreau ; c’est la solution la plus appropriée dans ce cas.
Considérations finales
Il est souhaitable que les enfants acquièrent la vertu de justice, non seulement pour bien se comporter au sein de la famille, mais aussi avec leurs amis, et également en tant que citoyens responsables. Et, à cet égard, nous devons tenir compte du fait que, “s’opposer et critiquer a priori, censurer et blâmer aveuglément, sans procéder à aucune analyse préalable, constitue un acte d’injustice, un attentat à la justice distributive, seule vertu qui permette aux Etats d’exister et de maintenir l’ordre”.
Ce que nous cherchons à développer, c’est le désir d’être juste, l’appréciation de ce qu’il est juste de faire dans chaque situation, en sachant que l’Ecriture fait plus de 800 fois référence à la notion de justice et d’”homme juste”, expression que le langage biblique utilise pour désigner “l’homme bon”, “le saint”.