L’obéissance

“La personne obéissante accepte les décisions de celui qui détient et exerce l’autorité, en les assumant comme les siennes propres, à condition qu’elles ne s’opposent pas à la justice, et elle réalise avec promptitude ce qu’elle a décidé, en s’efforçant d’interpréter fidèlement la volonté de celui qui commande”.

 

 

Il est intéressant de se demander pourquoi la vertu de la justice est à la mode, alors que l’obéissance - l’une de ses composantes - ne l’est plus. Chez certains, l’obéissance suscite l’impression désagréable de voir leur propre volonté dominée par le pouvoir d’un autre. Ils pensent qu’en obéissant, ils sacrifient leur personnalité. Ils pensent que l’obéissance aliène la liberté, la créativité, l’esprit d’initiative. Et c’est justement parce qu’ils ont eux-mêmes quelques doutes quant au bien-fondé de l’obéissance que certains parents se montrent très permissifs avec leurs enfants.

Mais l’obéissance, en tant que vertu, n’est pas la soumission aveugle de l’esclave. Et si la personne obéit en se rebellant intérieurement, il n’y a pas là vertu. Il y en aura guère plus si elle obéit parce que celui qui commande lui est sympathique. A strictement parler, l’obéissance est une vertu lorsque l’on s’exécute parce que l’on a reconnu l’autorité de celui qui commande.

Peut-être la raison principale du rejet de l’obéissance, du moins parmi les jeunes, est-elle qu’ils remettent en question la nécessité de compter avec des ”autorités”.

Il serait facile d’en déduire que cette attitude est le fruit d’un orgueil incontrôlé, mais il me semble préférable d’analyser plus en détail quelques unes des caractéristiques de la société dans laquelle nous vivons pour pouvoir mieux comprendre ce que signifie véritablement “obéir”.

 

La société permissive

Dans une société qui satisfait tous les besoins fondamentaux - nourriture, logement, habillement - du moins en ce qui concerne la grande majorité des gens, la personne éprouve un sentiment de sécurité qui lui permet remettre en question l’opportunité de souscrire aux structures existantes qui gouvernent les relations avec les autres. On met en doute l’action des autorités qui contrôlent ce bien-être général lorsque le pouvoir d’achat baisse et que l’on obtient moins pour le même effort, ou lorsque l’on voudrait obtenir le même résultat, voire un meilleur résultat, en fournissant moins d’efforts. On met alors en cause les compétences de l’autorité en question et l’on cherche une solution en essayant de changer de structure ou d’autorité. L’individu se rend rarement compte que c’est en lui-même que réside la solution - à condition que l’autorité agisse avec justice. S’il devient plus responsable, travaille plus ou mieux, il pourra trouver précisément ce qu’il veut et ce, là où il reconnait la valeur de ce qu’il recherche : un meilleur niveau de vie.

Mais si la personne ne se rend pas compte qu’il existe autre chose qui vaut la peine - je veux parler des valeurs non-matérielles - elle ne se posera même pas le problème, et il est logique que, dans ce cas, les autorités perdent leur raison d’être et que l’obéissance perde son sens. Ainsi, si l’on se désintéresse de la vérité et que l’on ne croit pas que l’Eglise en soit le dépositaire, pourquoi obéir aux directives du Pape ? Si l’on ne cherche pas à augmenter la justice, l’ordre, la bonté, pourquoi obéir aux philosophes ? Dans le passé, les philosophes ont joué un rôle important dans la résolution des problèmes de société, mais il semblerait que ce rôle soit remis en cause à l’heure actuelle. Si l’on attache pas d’importance aux valeurs de l’amour et du service des autres, que l’on ne comprend pas à quoi elles se réfèrent, pourquoi obéir aux parents qui sont les personnes déléguées par Dieu pour éduquer les enfants dans l’amour ?

Lorsque les valeurs permanentes, qui reflètent toutes partiellement le Bien Suprême, cessent de présenter un intérêt, les autorités, dont le rôle est d’aider les autres à découvrir ces valeurs et à mieux les vivre, se trouvent devant la nécessité de convaincre les autres de l’importance de ce qu’ils possèdent. Et cela n’est pas facile.

Une société permissive est une société au sein de laquelle l’unique valeur reconnue est le bien-être matériel, le plaisir qui découle de l’instant présent. Ni le passé, ni l’avenir n’ont de sens. Par conséquent, ce que la personne a de mieux à faire, c’est de suivre aveuglément ses instincts.

L’obéissance n’a donc de sens que par rapport aux valeurs que l’on accepte dans la vie. Les exemples abondent parmi les jeunes qui refusent de suivre les indications de leurs parents en ce qui concerne l’habillement, mais suivent la mode de leur petit groupe parce qu’à leurs yeux, la valeur la plus importante est d’être “comme les autres” ; qui agissent sans obéir à aucun ordre dans la vie quotidienne, mais qui, devenus par la suite des sportifs, obéissent à leur entraîneur. D’autres rejettent l’autorité civile, mais acceptent les ordres des dirigeants lors des manifestations de rue. Où est le problème ? Les jeunes n’obéissent-ils pas, ou serait-ce qu’ils obéissent à des “autorités” qui représentent des contre-valeurs ou des valeurs très pauvres ?

La leçon est claire. Nous autres, parents, devrions développer l’obéissance de nos enfants d’après les valeurs qui pour nous sont importantes. Si ces valeurs sont pauvres, il est probable que les exigences parentales ne produisent pas, chez les enfants, le développement escompté de la vertu, car ceux-ci s’exécuteront pour des motifs excluant le respect de l’autorité des parents. Les enfants qui n’apprennent pas la valeur de l’obéissance dès leur plus jeune âge auront plus de difficultés à la reconnaître et à en faire une habitude par la suite.

Je devrais apporter une précision : l’obéissance n’est pas une vertu réservée aux enfants et destinée à rendre la vie agréable aux parents. Cette vertu - comme toutes les autres - vaut pour la vie entière.

 

Les motivations

On peut établir une distinction entre les motifs profonds, qui doivent être connus des parents pour que ceux-ci puissent les expliquer aux enfants, et les motifs partiels dont les enfants et les jeunes auront besoin pour acquérir l’habitude d’obéir dans leur évolution vers une meilleure compréhension de ce qu’est l’obéissance.

En tant que vertu chrétienne, obéir à l’autorité légitime équivaut à obéir à Dieu. Et il n’existe pas de meilleur motif pour le bien. Le motif, c’est la certitude que, en obéissant, nous ne pouvons nous tromper. Celui qui commande peut se tromper. Celui qui obéit, non, à condition que ses actes ne s’opposent pas à la justice.

L’obéissance est également source de véritable liberté. Elle nous guérit de notre attachement à notre volonté propre. Nous savons que la volonté, par nature, tend vers le bien, mais l’intelligence ne saisit pas toujours ce qui est réellement bon. Nous nous verrons souvent obligés d’avoir recours aux autorités compétentes pour être sûrs qu’il y a adéquation entre nos désirs et le bien. L’obéissance, dans ces situations, contribue à nous donner la force et la persévérance pour poursuivre les objectifs que nous nous fixons dans la vie.

Ces motifs d’obéissance sont profonds, mais on ne les rencontre pas tous les jours, et encore moins chez les jeunes enfants. Cependant, si nous, parents, ne les gardons pas présents à l’esprit, nous courrons le risque d’exiger de nos enfants une obéissance fondée sur des motifs très pauvres.

Quels motifs peut-on suggérer aux petits enfants pour qu’ils soient obéissants, et comment s’y prendre pour les motiver ? Un petit peut obéir parce qu’il reconnaît intuitivement l’autorité de ses parents. Ceux-ci lui procurent sécurité, affection, sentiment de bien-être, et tout cela le porte à répondre à leurs désirs, même si, parallèlement, il est tenté de désobéir pour mesurer sa propre force et sa capacité d’agir de façon indépendante. Il reconnaît inconsciemment l’existence de sa propre volonté. A ce moment survient ce que l’on a coutume d’appeler l’âge du “non”. Après l’âge de trois ou quatre ans, l’enfant entame le processus, si pénible pour les parents, qui correspond au développement de sa propre volonté. Si, auparavant, “Papa savait tout”, à présent, “Papa n’est plus si savant”, et l’enfant commence à exiger de ses parents qu’ils le convainquent d’obéir. Il comprend la nécessité des règles du jeu et, une fois qu’il sait en quoi elles consistent, il lui sera plus facile d’obéir, motivé par l’idée qu’un certain ordre s’impose pour pouvoir vivre ensemble. A partir de cinq ans, les motifs vont changer. Au départ, la motivation de l’obéissance peut être l’autorité des parents : elle est suffisante pour que l’obéissance soit vertueuse. Bien que cette autorité ne se perde jamais, il faudra employer des moyens complémentaires pour que le jeune continue d’obéir à cause de l’autorité des parents, mais en comprenant mieux la nécessité de cette obéissance.

Dès l’âge de cinq ans, il faudra tout à la fois exiger directement des enfants, et leur expliquer les raisons de ces exigences,  de telle sorte qu’ils obéissent parce qu’ils voient que cela est raisonnable. Ils peuvent aussi obéir par amour filial, en sachant que leur obéissance est une façon d’exprimer cette affection. Nous reviendrons sur ce sujet en abordant les problèmes spécifiques que pose l’obéissance à cet âge.

A partir d’environ treize ans, il convient que l’obéissance procède d’une réflexion. Et les motifs de l’obéissance devraient correspondre aux valeurs que les jeunes commencent à vivre de façon plus ou moins consciente.

Avant de poursuivre, je voudrais éclaircir un point. Nous avons parlé de la relation obéissance-autorité entre parents et enfants. Cette relation n’est pas, à strictement parler gouvernée par la vertu d’obéissance mais par la vertu de piété, qui exige que nous rendions à nos parents l’honneur et le respect qui leur sont dus. Pour notre propos, nous ne distinguerons pas ces deux vertus. Cependant, connaître cette distinction peut nous aider à comprendre l’importance d’aider nos enfants à obéir aux autorités extra-familiales. Il est logique, par conséquent, qu’à l’autorité naturelle des parents corresponde une obéissance motivée par l’amour, et qu’à l’autorité acquise des autres correspondent une obéissance motivée par la justice.

Il s’agit, dans les deux cas, d’obtenir une obéissance qui soit en fonction de l’autorité d’un autre - non seulement parce qu’il la possède (elle lui a été conférée), mais également parce qu’il l’exerce.

 

L’obéissance jusqu’à l’âge de treize ans

Jusqu’à l’âge de treize ans environ, le manque d’obéissance ne pose en général pas de sérieux problèmes. Il ne fait que gêner et exaspérer les parents. Dans bien des cas, la désobéissance peut provoquer un danger physique plus que moral. (Par exemple, un enfant désobéit à la recommandation de ne pas jouer dans un endroit dangereux, tombe et se casse un bras).

En revanche, c’est le moment d’apprendre aux enfant à obéir pour des motifs élevés,  afin qu’ils acquièrent l’habitude d’obéir avant d’arriver à l’adolescence. C’est pourquoi il ne suffit pas d’obtenir que les enfants obéissent sans plus : il faut qu’ils obéissent bien. C’est ce que nous allons approfondir en examinant quelques erreurs typiques.

Les parents se contentent facilement d’une obéissance plus ou moins aveugle, parce qu’elle donne les mêmes résultats, à savoir la paix et l’ordre. Mais nous ne nous rendons pas compte du “risque qu’il y ait simple collaboration involontaire à chaque fois qu’on exige l’obéissance sans faire appel à la conscience de l’individu”. Il ne suffit pas que l’enfant fasse ce qu’on lui demande, sinon il ne pourra pas développer la vertu de l’obéissance.

Considérons, à cet égard, les lacunes caractérisant le plus fréquemment l’obéissance des enfants, et suggérons quelques critères pouvant être utiles aux parents.

Ces lacunes peuvent être les suivantes :

- qu’ils obéissent de façon routinière, par une simple exécution extérieure, sans essayer de bien faire ni de répondre aux désirs réels de celui qui commande ;

- qu’ils se contentent du strict minimum pour qu’il y ait obéissance, au lieu d’accomplir généreusement, jusqu’à faire plus que ce qui est demandé ;

- qu’ils obéissent tout en critiquant celui qui commande ;

- qu’ils se défilent pour ne pas avoir à obéir, ou émettent de fausses excuses, en s’appuyant parfois sur l’autorité d’une autre personne (“Maman a dit qu’il n’y avait pas besoin de le faire”) ;

- qu’ils tentent de persuader celui qui commande de s’adresser à quelqu’un d’autre ou de lui faire croire que la chose demandée n’est pas vraiment nécessaire ;

- qu’ils obéissent en pensant à leur mérite, pour en tirer ensuite vanité ;

- qu’ils disent qu’ils vont obéir et n’en fassent rien ;

- qu’ils recherchent l’appui des frères et soeurs ou des camarades pour constituer un groupe d’opposition.

Comment faire face à ces problèmes ?

 

L’attitude des parents

L’obéissance est facilitée par une attitude cohérente des parents. En effet, s’ils se comportent différemment selon leurs états d’âme, de telle sorte qu’un jour, ils exigent une chose et le lendemain une autre, il est probable que l’obéissance ne se développe pas chez les enfants. D’après Otto Dür, “tout manque de cohérence dans la pédagogie, tout manque d’unité entre l’intention et l’action éducatives tuent les germes de l’obéissance”. Evidemment, l’unité est importante, mais il ne faut pas oublier que nous sommes humains et que l’on ne peut s’attendre à trouver un comportement parfaitement uniforme et cohérent. De toutes façons, l’important est de lutter pour se dépasser dans les choses que l’on considère fondamentales et donner une information très claire aux enfants sur ces valeurs.

Dans la pratique, cela suppose que l’on exige l’obéissance dans moins de choses qu’on le souhaiterait. Si l’obéissance des enfants nous intéresse pour qu’ils deviennent meilleurs et qu’ils évitent le mal, nous ne devons pas gaspiller nos efforts à rechercher une obéissance superflue ou moins importante dans des choses qui ne peuvent pas leur faire de mal. C’est-à-dire des choses qui nous gênent parce qu’elles ne correspondent pas à notre façon de faire,  mais qui, au fond, sont discutables.

Dans les choses fondamentales, nous pourrons ainsi faire comprendre à l’enfant ce que nous voulons, nous assurer qu’il a bien écouté, pour ensuite commander, en spécifiant “quand”, voire “comment” il doit obéir.

Mais nous avons dit qu’une obéissance aveugle, réduite au minimum, ne nous intéressait pas. Il est alors précieux de pouvoir compter sur le conjoint, les frères et soeurs ainés et les autres parents pour suggérer à l’enfant qu’il ne s’agit pas de se contenter du strict nécessaire mais d’essayer de faire plus, que l’ordre soit exprès ou tacite.

Cela nous ramène aux trois degrés classiques de l’obéissance :

a) réduite à une simple exécution extérieure ;

b) impliquant la soumission intérieure de la volonté ;

c) impliquant l’entière soumission du jugement propre.

L’éducation de l’obéissance nécessite aussi une capacité d’observation et une sensibilité très grandes de la part des parents, car bien des facteurs peuvent contribuer à faire naître chez les enfants une attitude de révolte et de désobéissance. Avec les petits, si l’on donne des explications claires et opportunes accompagnées de beaucoup d’affection, en maintenant toujours un climat d’ordre, les résultats sont généralement positifs. Mais à l’âge de treize ou quatorze ans, il semble que, très souvent, réapparaisse le phénomène du “non” constaté vers trois ou quatre ans.

Les causes peuvent être multiples. Par exemple, une trop grande insistance de la part des parents dans les choses secondaires ; un désordre habituel dans le mode de vie ; l’énervement des parents ; le recours abusif aux menaces ou aux vaines promesses et, par ailleurs, toute une série de facteurs provenant de l’enfant lui-même. Il faudrait réfléchir sur les rapports entre manque de pureté et désobéissance ou entre injustice et désobéissance (l’enfant qui copie aux examens). Si les enfants sentent que tout n’est pas net dans leur conscience, ils ne seront pas à l’aise et il est possible qu’ils le montrent en désobéissant.

Nous, parents, devons nous montrer attentifs au comportement des enfants dans les moindres détails, principalement pour être au courant de ce qui leur arrive. Il est souhaitable de leur donner une information adéquate sur les problèmes liés à l’obéissance que nous avons évoqués, puis les encourager en leur montrant notre confiance.

Lorsque les enfants ont manifestement compris qu’il leur faut discerner et accomplir la volonté des parents, même si elle n’est que tacite, le moment est venu pour ces derniers d’exprimer leur affection et leur gratitude. Nous avons le droit d’être obéis, mais les enfants seront plus enclins à obtempérer s’ils savent que nous apprécions leurs efforts.

 

L’obéissance des adolescents

Jusqu’à présent, nous nous sommes centrés sur l’obéissance vis-à-vis des parents, car c’est elle qui, conjointement avec celle qui s’exerce envers les professeurs, permet le mieux de développer la bonne habitude qu’est l’obéissance.

Mais n’oublions pas pour autant celle que les enfants doivent montrer aux autres autorités. Aux âges précédemment étudiés, les enfants obéiront normalement à ces autorités, parce que les parents ou les professeurs leur en ont donné l’ordre. Ils obéiront au chef de l’équipe, à quelque parent venu s’occuper d’eux, à un agent de police pour traverser la rue au bon moment, à l’entraîneur sportif. Et à Dieu, grâce à la formation de leur conscience, avec l’aide des parents et des autres éducateurs.

A l’approche de l’adolescence, il est possible qu’ils commencent à rejeter dans l’ombre la nécessité d’obéir à ces autorités, voire qu’ils se mettent à obéir à d’autres personnes, plus ou moins consciemment.

Dans notre définition initiale de l’obéissance, nous avons dit qu’elle consistait à accepter, en les faisant siennes, les décisions de quiconque détient et exerce l’autorité, à condition que celles-ci n’aillent pas à l’encontre de la justice. Cela suppose de reconnaître l’autorité réelle de certaines personnes, de savoir distinguer ce qui est juste de ce qui ne l’est pas, de savoir assumer les décisions d’un autre. La capacité d’assumer les décisions d’un autre dépendra de l’habitude qu’on aura pris de le faire, de notre reconnaissance de l’autre en tant qu’autorité et de la reconnaissance de l’ordre ou de l’indication comme étant juste et raisonnable.

Il est bon d’insister sur ces facteurs au moment de l’adolescence. La première difficulté concerne la capacité de distinguer entre :

1) les personnes qui détiennent l’autorité et l’exercent

2) les personnes qui la détiennent sans l’exercer

3) les personnes qui n’ont reçu aucune autorité mais qui exercent une grande influence.

Les parents ont été investis par Dieu d’une autorité pour éduquer leurs enfants et ils doivent l’exercer. L’autorité parentale doit être “une influence positive qui soutient et accroît l’autonomie et la responsabilité de chaque enfant ; c’est un service à rendre aux enfants dans leur éducation, un service qui implique le pouvoir de décider et le pouvoir de sanctionner ; c’est une aide qui consiste à diriger la participation des enfants dans la vie de famille, et à orienter leur autonomie croissante, en les responsabilisant ; c’est une composante essentielle de notre amour pour eux, qui se manifeste de diverses manières selon les circonstances, dans les rapports parents-enfants”. Si nous, parents, n’exerçons pas l’autorité de façon raisonnable, il est probable que les enfants ne se sentent obligés d’obéir, ni à nous, ni à aucune autre autorité.

Nous pouvons aider les enfants à reconnaître les personnes investies d’une autorité : l’Eglise, les autorités civiles, sociales, culturelles. La personne a une autorité réelle lorsqu’elle défend et renforce les valeurs qui en valent la peine. Si les valeurs qu’elle prétend transmettre sont pauvres ou équivoques, ou s’il y a incohérence entre ce qu’elle dit et ce qu’elle fait, son influence positive sur les jeunes sera d’autant plus faible. (Par exemple, les autorités qui prêchent la paix tout en entretenant une guerre injustifiée).

C’est là que se situe le principal danger : que les enfants acceptent l’autorité d’autres personnes, non pour la validité des valeurs qu’elles défendent, mais à cause de l’influence qu’elles exercent. Ce pouvoir pourrait se décrire ainsi : “sans autorité reçue, elles arrivent à susciter l’enthousiasme et à pousser à l’action d’autres personnes, par leur présence, leurs paroles, leur capacité d’organisation et, qui plus est, elles réussissent à les garder soumis jusqu’à ce qu’elles aient atteint leurs objectifs”. Il peut s’agir de personnes qui jouent avec les instincts des autres, avec leurs passions,  qui réussissent à convaincre à l’aide de demi-vérités ou d’informations fausses mais bien présentées. En un mot, des manipulateurs.

Face à ce danger, quels recours avons-nous en tant qu’éducateurs ? Je crois qu’il faut obtenir des enfants qu’ils obéissent sur un point fondamental : réfléchir  avant d’agir. Le développement de la vertu de prudence, ainsi que d’autres capacités, notamment le jugement critique, sera la meilleure arme pour leur permettre de distinguer entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal, entre une autorité ayant droit à l’obéissance et un manipulateur visant à d’autres fins que le progrès des jeunes.

L’obéissance est un élément essentiel de la vertu de justice. Il est important de l’envisager sous cet angle. Il faudra raisonner avec les enfants pour leur montrer qu’ils doivent obéir, parce que les parents et les autres ont droit à ce qu’on leur obéisse. Il pourront ainsi se soumettre par amour et par sens profond du devoir.

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